
La fin du « bricolage » marketing
Nous sommes fin 2025. Vous dirigez une PME ou une ETI et vous avez compris que l’automatisation n’est plus une option, mais le moteur même de votre croissance. Vos équipes jonglent entre le CRM, LinkedIn, les outils d’e-mailing et des fichiers Excel. Le marché de l’automatisation pèse désormais des milliards, et pour cause : c’est le seul moyen de scaler sans doubler vos effectifs.
Vous êtes face à un mur. D’un côté, Zapier, le géant américain omniprésent, facile d’accès mais qui peut vite coûter le prix d’un loyer parisien. De l’autre, Make (ex-Integromat), une alternative visuelle puissante, moins chère, mais qui effraie par son interface de « développeur ». Choisir le mauvais outil maintenant, c’est garantir une dette technique paralysante dans 12 mois.
Faut-il privilégier la simplicité immédiate de Zapier ou investir dans la puissance modulaire de Make pour piloter votre marketing ?
Je vais être direct : pour une stratégie de génération de leads pérenne et scalable en PME/ETI, Make est techniquement et économiquement supérieur.
Zapier reste excellent pour des connexions simples et rapides (A vers B). Mais si vous voulez construire une véritable machine de guerre marketing – capable de nettoyer de la donnée, de router intelligemment des leads et d’intégrer de l’IA – Make est incontournable. Dans cet article, je ne vais pas me contenter de comparer des fonctionnalités. Je vais vous montrer comment orchestrer cette transition à travers 5 workflows concrets, pour transformer votre stack technique en levier d’excellence, comme nous l’évoquons dans notre article intitulé « IA & PME / ETI : l’excellence à portée de main ».
Le choc des philosophies : linéarité vs orchestration
Pour comprendre pourquoi je pousse souvent mes contacts vers Make, il faut regarder sous le capot. Ce ne sont pas juste deux logiciels différents. Ce sont deux visions du monde.
Zapier : le syndrome du couloir
Imaginez un couloir. Vous entrez par une porte (le Trigger), vous marchez tout droit, vous faites une action, puis une autre. C’est Zapier.
- La promesse : « Si ceci, alors cela ». C’est rassurant. C’est linéaire.
- La limite : la réalité du business n’est pas linéaire. Parfois, si un lead arrive, vous voulez vérifier s’il existe déjà avant de le créer. Ou alors, vous voulez traiter une liste de 50 produits commandés. Sur Zapier, gérer des boucles ou des exceptions complexes devient vite une usine à gaz coûteuse (les fameux « Paths » sont limités).
Make : le tableau blanc infini
Make fonctionne comme une carte mentale. Vous posez un module au centre, et vous pouvez faire partir des branches dans toutes les directions.
- La puissance visuelle : vous voyez vos données circuler. Vous pouvez dire : « Si le lead est un CEO, passe par là. Si c’est un stagiaire, arrête tout. »
- Sous le capot : Make vous donne accès à la mécanique brute des APIs. Vous pouvez manipuler des données JSON, gérer des erreurs (ex: « Si l’API LinkedIn ne répond pas, attends 5 minutes et réessaie »), et transformer des tableaux de données. C’est là que réside la vraie robustesse.
L’argument financier : arrêtez de payer pour rien
C’est souvent ici que le débat se clôture pour les DAF. La différence de modèle économique est brutale.
Zapier : la taxe au succès
Zapier facture à la tâche. Chaque action réussie est une tâche. Vous avez un processus de 10 étapes ? C’est 10 tâches. Vous traitez 1 000 leads par mois ? C’est 10 000 tâches. La facture grimpe verticalement. Pour une ETI active, un budget Zapier de 600 $ à 1 000 $ par mois n’est pas rare.
Make : le coût de l’opération
Make facture à l’opération. La nuance ? Make est beaucoup, beaucoup moins cher au volume. Pour environ 30 $ par mois, vous avez souvent assez de capacité sur Make pour gérer ce qui vous coûterait 300 $ ou 400 $ sur Zapier.
Mon conseil : si votre budget marketing est serré, commencez par Make. La courbe d’apprentissage est un investissement en temps qui se rembourse en cash dès le 3ème mois. Attention cependant aux « polling triggers » sur Make (vérifier s’il y a des nouveaux leads toutes les 5 min) qui consomment des crédits même s’il n’y a rien. Il faut savoir les paramétrer.
5 automations concrètes pour générer et convertir
Assez de théorie. Passons à la pratique. Voici les 5 piliers que j’installe systématiquement pour structurer l’acquisition.
Automation #1 : le lead scoring « intelligent » (Make only)
Vous ne pouvez pas traiter tous les leads de la même façon. Un étudiant qui télécharge un PDF n’est pas un DSI qui demande une démo.
- Le problème Zapier : faire des calculs mathématiques (Score actuel + 10 points) et gérer des logiques conditionnelles multiples (Si Score > 50, alors MQL) est laborieux et consomme énormément de tâches.
- La solution Make :
- Trigger : le prospect visite la page « Tarifs ».
- Get Record : Make va chercher sa fiche dans le CRM (HubSpot/Salesforce).
- Math : une formule simple met à jour le score.
Score = Score + 20. - Router (Le secret) : le flux se sépare.
- Branche A (Score < 50) : On ne fait rien, ou juste un petit email de nurturing.
- Branche B (Score > 50) : Alerte Slack immédiate aux commerciaux + Changement de statut dans le CRM.
C’est fluide, logique, et ça ne coûte presque rien en opérations.
Automation #2 : LinkedIn Ads vers CRM (speed to lead)
La réactivité est la clé. Un lead contacté dans les 5 minutes a 9 fois plus de chances de convertir.
- Le Workflow :
- Un prospect remplit un formulaire « Lead Gen » sur LinkedIn (pré-rempli, donc très faible friction).
- Make/Zapier intercepte le lead instantanément.
- Formatage : nettoyage du numéro de téléphone (souvent un cauchemar sur les formulaires internationaux). Make excelle ici grâce à ses fonctions de « Parser » téléphonique.
- Injection CRM : création du contact dans HubSpot ou Pipedrive.
- Le verdict : ici, Zapier se défend bien car son intégration LinkedIn est très stable. Mais si vous devez re-formater la donnée (ex: mettre le Nom en majuscules, séparer Prénom/Nom), Make vous offre des outils de manipulation de texte bien plus puissants sans surcoût.
Automation #3 : l’enrichissement de données
Un lead avec juste un email « jean.dupont@gmail.com », ça ne vaut pas grand-chose. Vous avez besoin du SIREN, du poste, de la taille de l’entreprise.
- L’outil clé : Dropcontact ou Clearbit.
- Pourquoi Make gagne : l’enrichissement prend du temps. Dropcontact, par exemple, est asynchrone. Vous envoyez la demande, et la réponse arrive 10 à 40 secondes plus tard.
- Sur Zapier, faire une « pause » bloque le processus.
- Sur Make, vous utilisez un module « Sleep » ou vous séparez le scénario en deux. Vous envoyez la requête, et un webhook attend la réponse de Dropcontact pour mettre à jour le CRM. C’est ce niveau de détail qui garantit la qualité de vos données, un pré-requis absolu pour intégrer l’IA dans vos processus PME.
Automation #4 : le routage Slack des VIP
Ne noyez pas vos commerciaux sous les notifications. Ils détestent ça. Ils finiront par « Mute » le canal Slack.
- L’approche chirurgicale : utilisez un Router dans Make pour filtrer.
- Le lead a-t-il un email professionnel ? (Pas de Gmail/Yahoo).
- L’entreprise a-t-elle plus de 50 employés? (Donnée issue de l’étape d’enrichissement).
- L’action : si et seulement si ces conditions sont remplies, envoyez un message Slack formaté (avec le module JSON de Make pour faire un beau design) taguant spécifiquement le commercial en charge de la région. « 🔥 Hot Lead : Directeur Marketing chez [Entreprise], basé à Lyon. ».
Automation #5 : la content factory hybride (IA + Humain)
Créer du contenu pour le nurturing est chronophage. Automatisons le brouillon.
- Trigger : une nouvelle ligne dans un Google Sheet avec un sujet (ex: « Les tendances SEO 2025 »).
- Module OpenAI (Make) : « Agis comme un expert SEO et rédige un plan détaillé pour un article sur ».
- Module Google Docs : création d’un document avec le plan généré.
- Module Slack : notification au Copywriter : « Ton plan est prêt, tu peux commencer à rédiger. »
Ici, on ne remplace pas l’humain, on l’augmente. On supprime le syndrome de la page blanche. Make gère très bien les « tokens » d’OpenAI et les erreurs potentielles si l’IA met trop de temps à répondre.
Attention au Piège du « Bland Content »
Automatiser, c’est bien. Robotiser, c’est la mort. L’erreur classique que je vois chez les marketeurs qui découvrent ces outils, c’est de vouloir tout automatiser, jusqu’à l’écriture des emails de vente.
Ne faites pas ça. Utilisez Make et Zapier pour la logistique (déplacer la donnée, nettoyer, alerter). Mais gardez la main sur le message. Si vos leads reçoivent des emails qui sentent le robot à plein nez, vous détruisez votre image de marque (Bland Content). L’automatisation doit servir à libérer du temps pour créer du contenu à forte valeur ajoutée, pas à générer du bruit.
Il est temps de choisir votre camp
Alors, Make ou Zapier?
Si vous êtes une petite équipe, que vous avez peur de la technique et que le budget n’est pas un frein (ou que vos volumes sont faibles) : Zapier fera le job. C’est un excellent outil pour démarrer.
Mais si vous avez de l’ambition, si vous visez la scalabilité et que vous voulez construire un avantage concurrentiel durable : apprenez Make. La courbe d’apprentissage est réelle, oui. Vous allez peut-être passer deux soirées à comprendre les « Arrays » et les « JSON ». Mais une fois maîtrisé, vous aurez entre les mains une puissance de feu que Zapier ne pourra jamais égaler au même prix.
L’automatisation n’est pas une fin en soi. C’est l’infrastructure de votre succès futur. Ne la bâtissez pas sur du sable.
FAQ
1. Pour une entreprise soucieuse du RGPD, qui gagne le match ?
Make. C’est un point critique pour les PME européennes.
- Make : historiquement basé en Europe (République Tchèque) et racheté par Celonis (Allemagne), Make propose l’hébergement des données sur des serveurs européens. C’est un argument de poids pour votre conformité RGPD.
- Zapier : est une entreprise 100% américaine. Bien qu’ils respectent les cadres de transfert de données (Data Privacy Framework), vos données transitent par les États-Unis, ce qui peut nécessiter des clauses contractuelles plus strictes selon la sensibilité de vos leads.
2. J’ai commencé sur Zapier, est-ce facile de tout migrer sur Make pour payer moins cher ?
Non, c’est un projet à part entière. Ne sous-estimez pas la « dette technique ». Il n’existe pas de bouton « Importer depuis Zapier ».
- La réalité : vous devrez reconstruire chaque scénario manuellement. La logique linéaire de Zapier ne se traduit pas toujours directement dans la logique modulaire de Make.
- Notre conseil : adoptez une stratégie hybride. Gardez vos vieux « Zaps » simples qui tournent bien. Pour toute nouvelle automatisation complexe ou gourmande en volume, construisez-la directement sur Make. Migrez le reste progressivement uniquement si le coût Zapier devient insupportable.
3. Que se passe-t-il si une automatisation plante (erreur d’API) ?
Zapier est plus indulgent, Make est plus rigoureux. L’article parle du fonctionnement idéal, mais les erreurs arrivent (serveur CRM indisponible, email invalide).
- Zapier : offre une fonction « Replay » très simple. Si ça plante, vous recevez un email, vous cliquez sur un bouton, et il réessaie. C’est facile pour un non-technicien.
- Make : si une erreur survient et n’est pas gérée, le scénario s’arrête net pour éviter de corrompre les données. Pour éviter cela, vous devez configurer des modules de gestion d’erreurs (« Error Handlers » comme Ignore, Resume, ou Rollback). C’est plus puissant, mais cela demande d’anticiper les pannes lors de la création du workflow.